Nous poursuivons, avec cette planche 1 la représentation des tenues portées par les Corps francs levée sur l’ensemble de la République en 1792 et 1793.
Le personnage de gauche est un chasseur de la 1re compagnie franche de chasseurs de Paris, reproduit d’après une gouache de la magnifique série découverte à Munich, en 1922, et dont nous citons l'existence dans le texte qui accompagne la planche 1 de la présente suite.
Cette compagnie franche fut levée dans la section des Tuileries par Joseph Burg, dit Dubourg, ancien dragon du régiment de Chartres, et formée le 4 août 1792. Elle rejoignit l'armée sous Châlons, prit part aux opérations dans l'Argonne et au combat du camp de la Lune, le 30 septembre.
Le 9 octobre elle passa à l'armée de la Moselle et suivit Beurnonville dans son expédition sur Trèves.
A Pellingen, le 13 décembre, la compagnie se distingua d'une façon particulière et acquit en récompense le droit de porter la grenade. Le même jour, Jacques Dutruy qui avait remplacé Dubourg à la tête de la compagnie donnait au corps, dont l'effectif avait été augmenté à l'aide de volontaires, la dénomination de Légion de Paris.
Par décret du 27 février 1793, la Convention nationale forma de ce corps, réuni à la compagnie franche d'Humbert, le 15e bataillon d'infanterie légère ou 15e bataillon de chasseurs-éclaireurs.
Ce bataillon fut définitivement organisé à Évreux par le général de brigade Lefort, le 23 juillet 1793. Le numéro 15 étant déjà occupé, il prit le N°19 qu'il conserva.
R Knötel dans son « Uniformenkunde » présente la Légion de Paris. Cependant, son personnage, à la différence de celui qui nous servit de modèle, ne porte pas d'épaulettes. On peut cependant se demander si Knötel n'eut pas connaissance de l’existence de ces gouaches.
Aux côtés du chasseur de Paris, jeune officier du 1er bataillon des grenadiers fédérés de Paris (même source).
Ce bataillon fut formé à Chaudefontaine (Marne), le 20 septembre 1792, et fit partie de l'armée de la Belgique lors de sa formation le 24 octobre.
A Jemmapes, il prit une part active au combat et participa ensuite à la conquête de la Belgique.
Le 31 janvier 1793, le bataillon qui était à Liège présentait un effectif de 220 hommes. Il ne distingua le 16 mars à Tirlemont et le 18 à Neerwinden.
En avril 1793, il fut réorganisé à Valenciennes. Présent à la capitulation de la place, le 28 juillet, il devait, avec les autres corps être dirigé sur la Vendée.
Par décret du 21 août, la destination d'une partie de la garnison de Valenciennes fut changé et les grenadiers de Paris furent dirigés sur l'armée des Alpes. Il participa au siège de Lyon, rebelle à la République, et fut envoyé à Grenoble au mois de novembre. Il passa ensuite à Bramans, en Maurienne, puis à Modane, au Grand-Milord en Piémont, à Saint-Michel et au Mont-Cenis.
En octobre 1794 il passa à l’armée d’Italie. Il y fut appelé 1er bataillon de Paris. Il participa aux opérations actives et combattit à Loano le 2 frimaire an IV (23 novembre 1795).
Par ordre du 22 ventôse an IV (12 mars 1796), le 1er bataillon des grenadiers de Paris passa à la division Augereau.
Le 27 ventôse an IV (17 mars 1796), près d'Albenga, eut lieu la réunion des 69e et 211e demi-brigades de bataille, du 2e bataillon de la 45e, des 5e et 6e demi-brigades provisoires et du 1er bataillon des grenadiers de Paris qui formèrent une nouvelle demi-brigade qui conserva, provisoirement, le N°69. Son organisation définitive eut lieu, le 15 Prairial an IV (3 juin 1796), à Soncino (Italie), où on lui adjoignit le 3e bataillon de Volontaires des Côtes-du-Nord. Elle prit alors le N°18 qu'elle conserva.
Elle reçut par incorporation le 1er bataillon auxiliaire du Lot-et-Garonne, le 2e de hussards à pied et le bataillon complémentaire de la 19e demi-brigade de ligne.
De tous les bataillons de Paris, le 1er des grenadiers fut celui qui compta le plus de « Parisiens de Paris » et d'hommes d'âge mûr.
Certaine pourront s'étonner de la coiffure portée par cet officier, mais il faut savoir qu'à l'époque, le chapeau taupé était très à la mode parmi les civils. De nombreux officiers des Corps francs et des Légions l'adoptèrent en y fixant une plaque et, quelquefois un plumet, afin de lui donner un aspect plus militaire.
Si pour la troupe la tenue était quasiment réglementée, la plus extrême fantaisie régnait dans celle de bon nombre d'officiers des troupes hors ligne. Il est surprenant de ne pas trouver traces d'officiers coiffés du chapeau parmi les oeuvres de dessinateurs connus. Seul Job en a représenté mais ses dessins n'ont pas été publiés et sont, aujourd'hui, la propriété de quelques collectionneurs. Il fut le seul à donner aux soldats de ce temps l'aspect, si pittoresque, qui était certainement le leur.
Les deux hommes coiffés du casque à chenille appartiennent à la compagnie franche des Deux-Sèvres levée en 1792.
Nous les avons représentés d'après un texte, très précis, donnant la description de l'uniforme et conservé aux Archives départementales des Deux-Sèvres. Nous le reproduisons in extenso en respectant l'orthographe.
« Projet d'équipement pour la Compagnie franche des Chasseurs du département des Deux-Sèvres, organisée conformément au décret de l'Assemblée législative du 28 juillet 1792.
Habit bleu semblable à l'uniforme des Volontaires nationaux, à l'exception seulement des poches en long et épaulettes vertes, gilet blanc à trois rangs de petite boutons.
Culotte bleue à la hussarde, les coutures garnies d'un petit galon en laine jaune.
Demi-guêtres en cuir ou bottines à la hongroise.
Pour coiffure un casque noir avec pompon vert.
Pour armes un fusil, baïonnette, et un sabre avec dragonne verte, banderole de giberne et ceinturon en cuir noir. »
Ce projet d'uniforme fut soumis à Pache, Ministre de la guerre, Celui-ci répondit aux administrateurs du département des Deux-Sèvres, par lettre en date du 1er décembre 1792.
« J’ai reçu la lettre que vous m'avez écrite pour me demander les renseignements que vous croyez nécessaires pour régler la forme de l'habillement et de l'équipement de la Compagnie de Chasseurs nationaux, qui vient d'être levée dans votre département. Le citoyen Gabaret commandant de cette compagnie m'a présenté ses vues à cet égard, qu'il m'a paru très convenable d'adopter. En conséquence je vous fais passer la copie de son projet pour que vous puissiez le faire exécuter ».
Le Ministre de la guerre, PACHE.
Nous ignorons tout de cette compagnie, la date de sa création, celle de son licenciement ou de son incorporation dans une demi-brigade.
À droite, reconstitution de l'habit de la compagnie franche des Deux-Sèvres.
Nous remercions Monsieur A Geoffroy, Directeur des services d'Archives du département des Deux-Sèvres, qui a bien voulu faire pour nous les recherches nécessaires pour la réalisation de cette planche.
Bibliographie :
L Hennet - Les Volontaires nationaux pendant la Révolution. Paris 1906.
Légions et Corps francs de la République Française. Paris an IV.