Corps Francs de la République 1792-1794, première planche de la collection L'Armée Française et ses Alliés 1792-1815 par Jacques Domange.
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Jacques Domange
- Planche 1 -

À la fin de 1922, un officier de l'ancienne armée impériale allemande fit l'acquisition chez un libraire de München pour un prix très modique, d'une extraordinaire série de gouaches de l'époque révolutionnaire. Cet homme devint, par la suite, un personnage parmi les plus importants de la vie politique allemande. Capturé par les alliés en 1945, il mourut l'année suivante.

Malgré la confiscation de ses biens ordonnée par les puissances occupantes, sa veuve, disparue depuis, réussit à conserver un certain nombre d'objets dont la vente devait lui permettre de subsister au cours des années qui suivirent le désastre de 1945.

C'est ainsi que ces gouaches devinrent, en 1949, la propriété d'un collectionneur d'Ingolstadt. A la mort de celui-ci, survenue en 1971, elles furent acquises par un amateur autrichien dont nous avons, malheureusement perdu la trace.

Ces dessins, au nombre de dix-neuf, sont d'un format 15x21 et conservés sous une reliure, plein veau, de l'époque. A l'origine leur nombre s'élevait à vingt-cinq mais six d'entre eux sont déchirés et leur état ne permet pas l'identification des sujets.

D'une facture naïve, ils sont cependant remarquables par la précision des détails. Chaque planche représente un nombre différent de personnages, les uns à pied, les autres à cheval, sous lesquels est inscrit, à l'encre, le nom du corps auquel ils appartenaient : bataillons de volontaires nationaux, légions et corps francs. C’est là un document capital puisque pour la première fois, à notre connaissance sont représentées les tenues de corps éphémères, inconnues jusqu'alors.

Le personnage de gauche appartient au 5e bataillon de chasseurs francs du Nord. Celui-ci est formé à Valenciennes, le 18 avril 1793, avec les 1re et 2e compagnies franches de chasseurs de Rethel et une compagnie d'Angoulême. Le bataillon de flanqueurs d'Hasnon et la compagnie franche de chasseurs-carabiniers des Quatre-nations y sont incorporés le 9 germinal an II (29 mars 1794). C'est à Roggendorf, près de Köln, que le 17 messidor an III (5 juillet 1795) le 5e bataillon de chasseurs francs du Nord est réuni au 3e de chasseurs francs du Nord et au 3e bataillon de tirailleurs. Le 23 messidor suivant (11 juillet) ces corps amalgamés prennent la dénomination de 1re demi-brigade de tirailleurs.

Le chasseur représenté est coiffé du casque du modèle de 1791. La bombe en cuir bouilli, renforcé par deux lames de laiton est peinte en vert. Le turban est soit en peau, soit en toile cirée peinte comme le casque exposé au musée de Douai, détruit durant la dernière guerre.

Certains auteurs prétendent que le casque figurant dans la collection R et J Brunon est le seul exemplaire parvenu jusqu'à nous. Cette assertion est erronée. Nous en connaissons un second, de l'ancienne collection Vaissier, aujourd'hui au musée de l'Armée à Paris.

On remarquera que ce chasseur est armé d'un mousqueton de hussard, modèle 1766.

Le grenadier, lui, appartient au 1er bataillon de grenadiers du Rhin dit, 1er bataillon des Amis du Bas-Rhin. Ce corps est formé à Strasbourg, le 28 brumaire an II (18 novembre 1793), avec trois compagnies de grenadiers de Rhône et Loire, trois compagnies de la Mayenne, une de la Manche et une du Puy de Dôme. Il est amalgamé, le 5 messidor an II (23 juin 1794), avec le 2e bataillon du 21e régiment d'infanterie, ci-devant Guyenne, et le 3e de la Corrèze, pour former la 42e demi-brigade de bataille.

À noter l'habit dont le collet, les revers, les parements, les pattes de parements et la doublure sont écarlates. Le bonnet à poil est muni d'une visière et garni d'une plaque en cuivre. Il est orné d'un plumet et d'un ruban tricolores.

Le jeune officier, de profil, est vêtu d'un manteau plus civil que militaire. Son chapeau est orné d'une énorme cocarde et d'un plumet tricolore non moins important.

Il fait partie de la compagnie franche de volontaires de Tourcoing, formée le 27 septembre 1792 et, entrée dans la composition de la 30e demi-brigade légère de 1re formation, le 24 brumaire an II (14 novembre 1793).

L'officier de droite, sert dans la compagnie franche des Éclaireurs de la Meuse formée le 8 février 1793 et incorporée dans la 9e demi-brigade légère de 1re formation, le 1er germinal an II (21 mars 1794).

Son habit a les revers blancs, de même que les parements. Ceux-ci sans pattes, se ferment à l'aide de deux petite boutons. Deux autres sont cousus au-dessus sur la manche.

Le rarissime et curieux casque représenté à gauche est la propriété d'un collectionneur suisse de Basel. C’est une variante du modèle de 1791. La bombe en cuir bouilli est peinte en vert et renforcée par trois bandes de cuir ornées de serpentins. La visière, plus courte que sur le modèle classique, suit la courbe de la bombe. Le bandeau est en toile cirée peinte.

Au-dessous, ornement de hausse-col et types de cocardes.

A droite, sabre briquet porté par les corps francs et les chasseurs volontaires nationaux; ornements de retroussis et plaque de bonnet de grenadier.

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